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Écriture : caractériser un personnage et respecter sa voix

Quand on parle de caractériser un personnage, on pense souvent à définir ses caractéristiques physiques et psychologiques en amont de l’écriture elle-même. Pourtant, l’écriture aussi sert la caractérisation des personnages. Du moins le devrait-elle.

Un bon texte, selon moi, c’est un texte qui illustre le personnage par ses actes et son propos. On pourra me dire qu’un·e tel·le est courageux·se ou vulgaire ou encore prétentieux·se, ce n’est pas ça qui caractérisera le personnage selon l’idée que l’auteur·rice s’en fait.

Et oui, on en revient toujours au show, don’t tell et à l’idée que si læ lecteur·rice ressent l’identité de votre personnage, cela aura bien plus d’impact que le fait que vous l’ayez simplement décrété.

Machine à écrire rétro
Donner une couleur et une voix à ses personnages Image de Freepik

La fiction, un mensonge avec un soupçon de vérité

N’avez-vous jamais pioché dans votre entourage ou dans votre propre expérience pour donner corps à un texte ou à un personnage ? Si la réponse est non, il est plus qu’urgent de commencer. C’est même un des conseils de Neil Gaiman himself dans sa Masterclass : pour donner une identité, une voix et un soupçon de vérité à vos personnages, mettez-leur un chapeau (un élément distinctif unique qui permet de les identifier au premier coup d’œil) et inspirez-vous des personnes que vous connaissez.

C’est également le principe de la célèbre méthode Actor Studio : pour donner de la vérité à son jeu d’acteur·rice, il est recommandé de chercher au fond de soi une expérience qui nous fait véritablement ressentir l’émotion à interpréter et de puiser dans ses propres sentiments pour nourrir ceux du personnage.

Ce n’est donc pas un truc ou une astuce, mais un véritable précepte qu’il est essentiel et urgent d’appliquer.

Respecter la cohérence de son personnage

Pour l’exercice de février, il va falloir donner de la voix. Ce n’est pas compliqué, mais c’est important et parfois délicat à tenir sur la longueur. Pourtant, de cette voix que vous aurez choisie pour votre personnage découlera sa cohérence, sa crédibilité et son identité.

Si vous avez choisi que votre personnage était une écervelée un peu stupide et très matérialiste, ses réactions et ses dialogues devront prendre en compte ces paramètres et elle ne pourra briller intellectuellement que par accident. De même, ses décisions et ses propos seront guidés par son matérialisme et son avidité.

Ou encore, si votre personnage est inspiré du fameux vieux tonton raciste et sexiste qu’on nous ressert à toutes les sauces, il devra être grossier, insupportable et mettre des mains au cul.

Ça peut sembler évident, mais nombre de personnages de série ont perdu toute crédibilité à mes yeux quand ils ont cessé d’agir en cohérence avec leur voix. Le dernier exemple qui me vient à l’esprit, attention spoiler, c’est Daryl en France qui oublie toutes les règles de sécurité dans un monde dévasté par les zombies et qui entre dans un hangar tranquilou bilou sans prendre la moindre précaution.

Ce genre de chose peut passer si le cours de l’histoire, le contexte, un évènement récent l’expliquent de façon crédible. Mais quand, sans raison, un personnage cesse d’agir selon sa voix, il perd de la crédibilité et donc du poids dans l’affect des lecteur·rices/spectateur·rices.

L’exercice d’écriture de février

Pour cet exercice, je vous demande d’écrire un même texte avec plusieurs voix. Choisissez parmi vos propres personnages, votre entourage ou définissez rapidement au moins 3 archétypes, et écrivez le texte autant de fois que vous avez de personnages, en veillant à chaque fois à respecter la voix de chacun·e !

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« Le dernier pas », ma série littéraire disponible sur Vivlio Studio

Écrite et publié en 2020 sur Rocambole devenu Doors, ma série littéraire « Le dernier pas » a fait l’objet d’une publication en e-book.

À ce titre, elle est disponible à l’achat pour la modique somme de 2.99 euros sur le shop Vivlio.

Annonce de la publication de "Le dernier pas" en ebook sur Vivlio Studio
Le Dernier pas, disponible sur Vivlio Studio

Si vous l’avez lue et que vous avez envie de partager votre avis, vous pouvez le faire ici ou pour donner un peu de visibilité à cette romance qui a du poil sous les bras !

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Exercice d’écriture : l’écriture ou la réécriture parodique

Pour l’exercice d’écriture (en retard) de janvier, étant donné que je n’ai pas pu préparer à temps ce que j’avais prévu, je vais présenter un exercice simple et amusant inspiré d’un article que j’ai rédigé il y a peu pour la Gazette de bouzouks.net, le jeu de rôle textuel sur lequel j’ai appris à écrire : l’écriture parodique.

Une critique cinéma parodique

Pour celleux qui ne le savent pas, Pincemi, mon personnage de jeu de rôle textuel, est rédactrice en cheffe et journaliste de la Gazette de Vlurxtrznbnaxl. Il m’arrive donc régulièrement d’écrire des articles de presse parodiques.

Pincemi, mon avatar bouzouk pour l’écriture parodique

Ces articles ont deux fonctions principales :

  • Promouvoir les RP (role play/jeu de rôle) en cours et/ou présenter des fonctionnalités, objets et mécaniques de jeu de façon RP
  • Amuser les autres joueureuses en écrivant une foule de bêtises

Ces articles sont parodiques et absurdes parce que tel est l’univers de bouzouks.net : une transposition ridicule à l’extrême des travers de notre société.

Comme j’ai récemment vu le film Barbie et que Pincemi est une sorte de Barbie assoiffée de pouvoir, de gloire et d’argent, il me semblait évident qu’elle devait rédiger une critique bouzouk de ce film. Ce que nous avons fait.

Pour cet article, j’ai choisi l’angle mégalo : Pincemi est révoltée de voir quelqu’un d’autre interpréter son rôle dans un film ouvertement inspiré d’elle et de sa plastique idyllique.

Extrait :

L’exercice d’écriture parodique

Pour cet exercice, je vous invite tout simplement à choisir un univers (il n’a pas besoin d’être absurde, il peut être tragique, futuriste, préhistorique, romantique, tiré d’un livre ou d’un film…) et un sujet à traiter : critique de film, de concert, de série, de livre, ou même un fait divers, une actualité, un édito… tout ce qu’on peut trouver dans un journal d’un tant soit peu rédigé.

Une fois que vous avez ces 2 éléments, il ne vous reste plus qu’à traiter votre sujet en tenant compte de l’univers et, si vous avez caractérisé votre journaliste, de son caractère et ses valeurs.

Cela vous aidera, dans l’écriture en général, à écrire différemment en fonction des personnages, notamment pour les dialogues ou si vous utilisez un point de vue focalisé (à travers les yeux d’un ou plusieurs personnages). En écrivant avec la voix de votre personnage et en adéquation avec votre univers, vous donnez de la force et de la crédibilité à votre texte.

En conclusion, l’écriture parodique, c’est…

L’écriture parodique est un bon exercice pour s’entraîner à trouver le ton adapté à l’univers et au personnage. C’est également un exercice qui peut se révéler amusant et assurément stimulant.

C’est d’ailleurs un exercice d’écriture que j’avais déjà effleuré avec un texte qui parodiait le journal de confinement romantique des bourgeois hors sol.

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Doublure Stylo et ses mille projets d’écriture

Je ne vais pas me fendre d’un bilan 2023 ni d’une liste de résolutions 2024, si ce n’est dans la Niouzlet qui, si elle finit par paraître, devrait contenir un regard en arrière sur tout ce que je n’ai pas fait et sur le peu que j’ai accompli en 2023.

En attendant, ce billet va plutôt être un regard vers l’avant, sur toutes les histoires qui s’agitent dans ma tête et dont j’espère, un jour, accoucher sur le clavier.

une checklist
On récapitule les différents projets d’écriture en cours Image de storyset sur Freepik

Seule au monde

Les prémices de « Seule au monde » sont nés de mes trajets solitaires, écouteurs dans les oreilles pour me couper du reste du monde, et de mes angoisses de femme amoureuse et de mère. Le premier jet étant trop court pour constituer un roman, je ne sais pas encore à quel format sera ce texte.

Super Ménagère

Ce projet-ci est né d’un flash un peu fou que j’ai eu en rentrant après avoir emmené mon fils à l’école et y avoir récupéré le moule de son gâteau d’anniversaire, un inspirant moule à savarin qu’il m’a pris d’enfiler à mon poing par le trou au milieu. Quand j’ai croisé un homme dans une ruelle peu fréquentée, ma première idée a été de lui envoyer un uppercut savarinique dans la face, puis d’entrapercevoir toutes les conséquences désastreuses de ce geste.

Mon imagination s’est ensuite emballée en créant une super héroïne féministe qui punirait les blagues et autres crimes misogynes à l’aide de l’arsenal de la parfaite ménagère. Vêtue d’un tablier, d’un foulard vichy sur la tête et de bottes en vinyle rose, elle pourrait faire jaillir de ses mains du liquide vaisselle ou matérialiser des cocottes en fonte et ferait regretter aux hommes leurs blagues salaces et la moindre petite main aux fesses.

Quand j’ai pitché l’idée, pour la blague, à Julien Simon, mon responsable édito et mentor chez Rocambole/Doors, il ne m’a pas découragée. Ce que j’ai pris pour un encouragement. J’ai donc gribouillé un synopsis dans la foulée. Depuis, il me démange sans que j’ai pris le temps de m’y replonger.

Un thriller sur Rosalie, prostituée camée

C’est au cours d’un atelier d’écriture en ligne avec Michael Roch que Rosalie a vu le jour. La prostituée et/ou femme brisée et/ou droguée est une sorte d’obsession chez moi et Rosalie est un douloureux mélange des trois. Avec seulement 2 courts textes à son sujet et une vague idée de qui elle est, j’ai encore du mal à façonner son histoire, mais je n’abandonne pas encore l’idée d’écrire un jour ne serait-ce qu’une nouvelle pour raconter le deuil douloureux de cette femme dont l’enfant a été assassinée (on retrouve, comme par hasard, la perte de l’enfant, une autre de mes angoisses profondes).

La fabrique d’une fille

Ce texte-ci est du fait de Gaëlle Levesque, une amie autrice qui a initié ce projet et publié son propre volet sur Doors. En en discutant, on avait trouvé que cela pourrait être une belle idée que toutes les femmes qui le souhaitent livrent la façon dont elles ont construit, ou plutôt, dont l’entourage et la société ont façonné leur féminité et, éventuellement, comment elles ont déconstruit cette création pour bâtir la femme qu’elles aspirent à être.

Vampapires

Vampapires, subtil et délicat jeu de mots, a surgi après que j’ai douloureusement subi toutes les saisons de The Vampire diaries (merci maman pour cet inspirant calvaire). J’en ai retiré non seulement des dogmes d’écriture et de narration « à ne surtout pas faire », mais aussi une furieuse envie de parodier cette série. Sauf qu’à parodier une parodie (même involontaire), on se retrouve avec quelque chose qui ne ressemble pas à grand chose et qui ne dit rien.

Aujourd’hui, j’aimerais reprendre ce projet et en retirer cet excès de sexe dont les récits vampiriques nous abreuvent pour ne garder que le propos autour de l’abus et de la prédation.

Après avoir perdu le contrôle et provoqué 2 drames, Tara, une vampire de plus de 500 ans, remet en question son mode de vie et la nécessité de devoir tuer pour se nourrir. Persuadée qu’il n’est pas nécessaire de tuer les humains dont les vampires se nourrissent, elle crée une sorte de ferme d’élevage d’humains destiné·es à nourrir les vampires de passage, qui ont le droit de s’en nourrir sur tout les plans, mais l’interdiction formelle de les blesser ou les tuer.

Exercices de Stylo

Les « Exercices de Stylo » sont un projet d’écriture ludique sous contrainte qui me trotte dans la tête depuis belle lurette, mais qui ne pourra voir le jour que quand j’aurai la disponibilité pour le faire, puisqu’il s’agit de faire mon propre « exercice de style » à la manière de Raymond Queneau, à savoir réécrire le même texte de 100 façons différentes.

Le JdR comme support d’écriture à partir de parties solo

Ici, on est encore une fois plus dans l’envie que dans le projet en cours, mais, en gros, l’idée consiste à créer du contenu textuel en prenant le jeu de rôle comme support, puis à étoffer, travailler et éditer ce contenu pour parvenir à un récit abouti.

Par exemple, depuis peu, j’ai entamé une partie du jeu de rôle solo Chroniques d’un vampire millénaire qui me sert à développer l’histoire de Tara et à tenter de démêler l’intrigue de Vampapires.

Sondage

Si vous avez envie de voir un de ces projets se concrétiser avant les autres et m’aider ainsi à prioriser mes idées, vous pouvez toujours me faire part de vos desiderata dans ce sondage :

Pas de résolution, mais une aspiration

Comme la plupart des auteurices, mon cerveau grouille d’idées et quand ça grouille, c’est dégoûtant.

Si je me refuse à toute résolution, qu’elle soit bonne ou mauvaise, je ressens tout de même l’envie de concrétiser certaines idées. Oui, on peut rêver. On peut même espérer que mes envies correspondront à vos desiderata, il paraît que ça fait vivre !

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Exercice d’écriture : poser les bases narratives d’une histoire avec Fracture

Contrairement à ce que son nom semble indiquer, Fracture n’a rien à voir avec une quelconque histoire d’os brisés. Vous découvrirez l’histoire de son nom dans le pdf des conseils d’utilisation de cet outil, qui n’a d’autre vocation que de vous accompagner dans la création de vos histoires, de vous divertir et d’encourager la créativité et le fun.

Support d’écriture créative et ludique, Fracture peut aussi bien être un outil de création d’histoires qu’un jeu de rôle ultra libre invitant ses joueureuses à un délire total et irrévérencieux (voir l’exemple dans la notice).

Un support pour poser les bases narratives d’une histoire

Cet outil ludique, conçu à partir du jeu Fractal, a été créé à partir de mon expérience d’autrice et d’éditrice, de ce que j’ai pu apprendre en termes de narration, notamment en travaillant avec Julien Simon, mon responsable édito chez Rocambole/Doors.

Je l’ai conçu pour aider les personnes qui le souhaitent à créer et/ou développer leur intrigue à partir de six éléments essentiels à une bonne histoire, à savoir les personnages, leurs relations, leurs désirs, leurs besoins, les obstacles et les enjeux.

Un support d’écriture créative

Avec Fracture, vous pouvez tenter, oser, inventer, innover. En se laissant guider par les dés, on peut développer, aller plus loin, s’ouvrir de nouvelles pistes à explorer auxquelles on n’aurait jamais pensé. C’est l’outil idéal pour expérimenter une idée, la tordre dans tous les sens et voir comment on peut l’améliorer, l’étoffer et rendre l’histoire encore plus prenante, ou encore plus délirante !

Une carte mentale pour relier ses idées
Une carte mentale pour relier ses idées
freepik

Un support d’écriture ludique

Fracture, c’est aussi le moyen de laisser libre cours à ses délires et à sa fantaisie, de se laisser aller à l’absurde, juste pour le plaisir d’inventer des âneries et de se marrer. Parce qu’un des objectifs de l’outil, et de mes ateliers en général, c’est de proposer des exercices qui permettent de trouver du plaisir dans l’acte de création et d’écriture. Parce qu’il ne faut pas forcément souffrir pour écrire.

L’exercice d’écriture du mois

Choisissez l’angle d’approche qui vous convient (ludique, narratif, expérimental) et posez les bases d’une histoire à partir d’une partie de Fracture. Pour l’instant, ne vous posez pas de questions sur la rédaction ni le style. Contentez-vous de poser les bases narratives d’une histoire en vous aidant de Fracture (ça m’aidera aussi à mesurer l’efficacité de mon outil :p ), à savoir vos personnages, leurs interactions et ce qui les motive.

Rendez-vous dans la prochaine Niouzlet pour voir ma propre tentative !

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Le "show, don't tell" du mangeur de pierre

« L’histoire sans fin« , c’est un de mes films préférés et ce, depuis
toujours. J’ai enfin pu le faire voir à mon fils, en ayant un peu peur
de ne plus ressentir la magie, mais si, elle était bel et bien là. Il y
aurait beaucoup à dire sur ce film (et sur le livre, mais je ne le
connais pas) et j’aurai sans l’ombre d’un doute l’occasion de brandir à
nouveau des bouts de ce film doudou. Mais pour l’heure, c’est une
réplique du Mangeur de pierre qui nous occupe.

Petit rappel contextuel

 Pour les profanes, petit rappel (attention, divulgâchage) :

On rencontre le mangeur de pierre au début de l’histoire. Alors qu’il parcourt Fantasia pour prévenir le pays du danger que représente le Néant, il croise la route d’un drôle de bonhomme et son escargot de course, ainsi que d’un vagabond et sa chauve-souris narcoleptique. Ils décident de prendre la route ensemble.

On ne revoit le mangeur de pierre que bien plus tard, quand Fantasia a presque entièrement disparu, engloutie par le Néant. Atreyu, en route pour le palais impérial, tombe sur le mangeur de pierre, seul, assis à même le sol, en train d’observer ses mains. Il a alors cette réplique déchirante :

On dirait de bonnes grosses mains pleines de vigueur.

Cette phrase lourde de sous-entendu, et l’air désolé du mangeur de pierre, suffisent à nous peindre le tableau du drame qu’il a vécu.

 Tell, don’t show

Attention, ça va sembler complexe, mais c’est simple. Au lieu de nous faire un flashback pour nous montrer ce qui est arrivé à ses acolytes (ce qui aurait été incroyablement convenu et chiant), le mangeur de pierre prononce cette simple réplique. Pour qui a suivi et se souvient du début de l’histoire, elle est limpide.

Mais le mangeur de pierre est bien obligé de faire un court débrief à Atreyu, qui, le pauvre, est complètement largué. On a donc la confirmation que le Néant a englouti les amis du mangeur de pierre et que celui-ci, malgré tous ses efforts, n’a pas réussi à les retenir. Mais… la réelle vocation de cette réplique est-elle de nous informer ?

Make me feel, don’t tell

Assurément non, puisque le mangeur de pierre raconte ensuite comment ses amis ont été emportés par le Néant et comment il a été incapable de les sauver. Cette réplique, bien qu’elle l’annonce, ne montre pas la disparition tragique des compagnons du mangeur de pierre, elle exprime bel et bien sa détresse face à ce drame et à son échec à les sauver. Elle est là pour l’empathie.

Il pourrait se contenter de raconter à Atreyu ce qui est arrivé à ses amis, mais il serait alors un simple narrateur, un personnage accessoire au service de l’intrigue. Mais le mangeur de pierre est plus que ça. Cette réplique en fait un personnage crédible, vivant et attachant. On comprend, et on ressent sa détresse. Ce qui fait qu’on ne l’oublie pas, malgré son faible temps d’apparition à l’écran.

Avec une seule petite phrase…

La force des dialogues

Les dialogues, quand ils sont bien utilisés, sont un outil fantastique. Ils peignent les couleurs d’un personnage. Son vocabulaire, ses intonations, ce qu’il choisi de dire ou ne pas dire, sont autant d’informations qui permettent de le décoder. En revanche, il n’y a rien qui sonne plus faux que des dialogues utilitaires, qui servent à résumer ce qu’on a déjà vu ou ce que les personnages qui discutent ont vécu ensemble.

C’est pour ça que cette phrase du mangeur de pierre a un tel impact : elle fait résonner très fort les émotions de ce personnages, pour les faire arriver jusqu’à nous.

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[décorticage littéraire] La pub Banga, ou l'imaginaire pour frapper les esprits

Avant toute chose, la pub Banga, c’est ça :

    Les personnes de ma génération connaissent toustes cette pub et son hymne « En route pour l’aventure ». Alors qu’on a oublié toutes les pubs Nutella et leur succession d’enfants trop lisses. À quoi ça tient ? Pas à la qualité du produit, ça, c’est certain !

L’incursion du rêve dans la réalité

    Banga, qui ne pouvait pas miser sur la qualité de sa boisson – ni sur son originalité – a trouvé le meilleur canal pour parler à nos âmes d’enfants : l’imaginaire. « En route pour l’aventure ! » nous clame la chanson de la pub. Mais comme il ne suffit jamais de le dire, Banga nous montre à quel point sa boisson chimique sait réveiller l’aventurier qui sommeille en nous (dire… montrer… vous l’avez ? ). Et voilà que l’enfant qui jouait mollement à l’aventurier dans son couloir d’une banalité désolante se retrouve propulsé dans une jungle luxuriante. L’aventure s’invite dans son morne quotidien, à grand renfort de rivière bouillonnante et de crocodile affamé.

Marquer les esprits

    C’est ce qui fait qu’on se souvient de cette pub et que, trente ans après, les quadras chantonnent encore « On ne résiste paaaaaaas… à l’appel du Banga ! ». L’incursion de l’imaginaire dans la réalité rend le moment plus intense, à tel point qu’il en devient inoubliable. Oui, trente ans après, on voit encore parfaitement cet enfant traverser la jungle de son couloir de liane en liane en faisant la nique à un crocodile menaçant. On avait en revanche totalement oublié la mère Barbara Gould digne d’un spot pour Kinder, dont on a d’ailleurs oublié toutes les pubs. Ne reste des pubs Nutella que l’arrière-goût insipide du quotidien trop lisse et trop parfait d’une famille tout aussi fake que le goût de la pâte à tartiner. L’image aseptisée de notre vie, ou de ce qu’elle est supposée être. Franchement, qui cela fait-il rêver ?

Comment on fait dans nos livres, alors ?

    Je vous vois venir. Ne comptez pas sur moi pour vous donnez des injonctions ni même des conseils d’écriture dans les décorticages littéraires. Le but de cette rubrique est de partager des techniques, des idées, de l’inspiration. Parenthèse magique, rêve éveillé, impression fugace… À vous de trouver si et comment vous frapperez les esprits avec vos écrits.

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Introduction au décorticage narratif

C’est un exercice tout neuf qui voit le jour sur ce blog (et signe en quelque sorte sa résurrection après une longue période de coma) : le décorticage narratif. Le principe ? Extraire des principes et techniques narratives de morceaux choisis (chanson, clip, dessin animé, film, série, fiction interactive, jeu vidéo… tout ce qui sert à raconter une histoire).

 Le pourquoi du comment

    Il y a quelques jours, au cours d’une discussion Mastodonesque très intéressante avec Stéphane Arnier sur le point de vue et le temps de narration (je vous recommande d’ailleurs ses articles ! ), j’ai eu recours à des chansons pour illustrer mon propos (et défendre l’indéfendable, la narration au présent ET à la première personne).

Depuis que j’ai lu ses articles sur le sujet, je cogite pas mal et je me suis dit que ça pourrait être intéressant de partager le fruit de ces réflexions. Intéressant pour vous, mais aussi pour moi, puisque ça m’incite à analyser toutes les formes de narrations qui me tombent sous la dent (manie que j’ai déjà, de façon plus ou moins consciente). Et parce que c’est INSPIRANT.

Décorticage n°1 : la narration au présent ET à la première personne

    J’avais prévenu, je défends ici l’indéfendable. Contre vents, marées et toustes celleux qui clament que le seul temps de narration est le passé simple, je me dresse et je dis « Non ». La narration à la première personne ? Je dis « Oui ». Mais, parce que l’adage qui dit qu’il faut connaître les règles avant de s’en affranchir dit vrai, j’ai arrêté de me reposer depuis quelques années sur mes acquis par imprégnation et j’ai bossé la théorie. Et aujourd’hui, je sais pourquoi j’aime écrire au présent. Et parfois à la première personne. Encore mieux, je sais même l’expliquer !

La narration au présent et à la première personne : cas pratique en chansons

    La première chose qui m’est venue au fil de ma réflexion, c’est « Comme d’habitude ». Dans cette chanson, Cloclo utilise le présent pour illustrer la monotonie, la routine de ce quotidien sans passion. Mais surtout, ce que j’aime, c’est qu’il délivre le regard désabusé du personnage sur son couple à l’agonie, ce qui est appuyé par la première personne : il se regarde vivre et agir et le récit qu’il fait de sa vie porte la couleur de son jugement et de son désespoir :

« mais toi »

« presque malgré moi »

« tout seul, je bois mon café « 

extrait des paroles de « Comme d’habitude »

Mais un seul exemple ne suffit pas, la science vous le dira. Alors j’ai confronté deux chansons des Rita Mitsouko : « Andy » et « Les histoires d’A ». Dans la première, le texte est au présent parce que la narratrice est spectatrice de l’histoire, qu’elle raconte au moment où elle se passe, pour finalement en devenir actrice : « Dis-lui oui, Andy » (qui fait d’ailleurs écho au « Dis-moi oui, Andy »). Dans « Les histoires d’A », le texte est au passé, parce qu’on nous raconte une succession d’anecdotes qui illustrent le propos de la chanson : les histoires d’amour finissent mal.

extrait des paroles de « Andy »
extrait des paroles de « Andy »
extrait des paroles de « Les histoires d’A. »

Conclusion

    Ce que j’aime avec le présent, que ce soit à la première ou à la troisième personne focalisée, c’est qu’il donne le regard du personnage sur son histoire au moment où elle se déroule. On a donc ses émotions, ses sentiments, ses impressions, ses réactions au plus proche de l’action. Le texte au présent nous délivre la vérité du personnage. Sa vérité immédiate, contrairement au passé, qui lui permet de tricher en apportant des ajustements et corrections rendues possibles par le recul que permet la distance temporelle.

Quant à la première personne, c’est un peu la même chose. Le « je » me donne l’impression d’être avec mon personnage, d’être au plus près de son ressenti et de sa vérité, là où la troisième personne met une distance entre lui et moi, et lui et son histoire. C’est toutefois une narration piégeuse et je vous invite à lire les articles de Stéphane Arnier sur le sujet avant de vous lancer !

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La méthode Actor Studio en écriture

Comme pas prévu, mais comme on s’y attendait, j’ai toujours une semaine de décalage pour la publication de cet article. Je compte sur votre indulgence pour tenir compagnie à la mienne. Cette semaine, l’atelier portait sur la technique Actor Studio transposée à l’écriture.

La méthode Actor Studio

Cette méthode est assez connue, et utilisée par la plupart des acteurs pour rendre leur performance plus réaliste et leur personnage plus convaincant. La technique est simple, puisqu’elle consiste à puiser dans sa propre expérience pour nourrir son jeu d’acteur. On recherche un souvenir pour ressentir les émotions qu’il suscite et on s’en sert pour donner corps au personnage.

Image par Björn Eichenauer de Pixabay

C’est comme ça que certain·es acteurices arrivent à pleurer de vraies larmes (avec de la vraie bave et de la vraie morve) là où d’autres se contentent de gémir en se déformant le visage dans d’atroces grimaces censées exprimer la souffrance morale.

La méthode Actor Studio transposée à l’écriture

Il s’agit de la même chose, mais à l’écrit. Elle permet de rendre l’émotion plus juste et le texte, plus immersif. Et oui, car qui dit émotion crédible dit identification ? Et qui dit identification dit empathie pour le personnage. Et là, c’est gagné. Parce que le but, c’est bien que læ lecteurice s’intéresse à notre personnage.

Image par Fathromi Ramdlon de Pixabay

Cette méthode peut rendre l’écriture plus pénible, parce qu’elle nous renvoie à des situations potentiellement douloureuses. Mais elle la rend également plus facile, car on n’a plus qu’à « raconter notre vie », en retirant le filtre de la situation initiale et en y apposant celui de notre personnage et de son histoire.

Il ne s’agit pas de raconter le souvenir, mais bel et bien de se souvenir de ce qu’on a ressenti dans une situation donnée et de le retranscrire à l’écrit en prêtant son émotion à ses personnages.

L’exercice de la semaine

Pour inaugurer l’exercice, j’ai choisi le thème « Grosse fatigue ».

Chronic fatigue syndrome

On s’est donc mis dans la peau de quelqu’un de très fatigué (ce jour-là, pour moi, ça n’a pas été très compliqué :p), on a fait appel au souvenir d’une fois où on était parfaitement crevé (fatigue morale ou physique) et on a rédigé un petit bout de texte pour exprimer l’épuisement de notre personnage.

À vous de jouer !

Voir le replay de l’atelier

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Exercice d'écriture : les pots en folie de Céline Badaroux

Voici venu le temps de l’atelier d’écriture de la semaine dernière. Malheureusement, je n’ai pas encore réussi à rattraper le décalage (que j’espère parvenir à combler cette semaine), mais je ne doute pas que vous saurez me pardonner ce petit retard.Et cette fois, c’est sur la talentueuse Céline Badaroux que je me suis appuyée pour vous proposer cet exercice ludique déclencheur d’inspiration : les pots en folie.

Les petits papiers

C’est le nom que leur a donné leur créatrice (qui vous explique ici comment elle les a créés et comment ils fonctionnent ^^). Et c’est un nom judicieux, puisque l’outil consiste en une multitude de petits papiers ! L’idée, c’est d’avoir un pot par catégorie, à savoir :

  • Genre
  • Époque
  • Lieu
  • Thème

Chaque pot contient autant de petits papiers que vous avez pu/voulu y glisser. L’avantage, c’est que le contenu des pots est vraiment personnalisable et vous pouvez tout à fait ne pas mettre « Espace » dans le pot « Lieu » si vous n’aimez pas les trucs chiants dans l’espace…

Vous pouvez aussi jouer sur le nombre de pots et sur leur contenu. On pourrait très bien imaginer un pot « Personnages ». De même, quand j’ai découvert cet outil au cours d’un atelier en ligne animé par Céline lors de la convention virtuelle « A Place to geek », nous n’avons pas utilisé le pot des thèmes. Croyez-moi, cela n’a bridé l’imagination de personne et les idées ont fusé dans tous les sens et à nos risques et périls.

Les pots en folie

Pour ma part, j’ai eu l’audace de renommer l’exercice en « Les pots en folie », parce que j’ai particulièrement aimé l’esthétique que Céline Badaroux a donné à ces anciennes conserves de petits pois devenues outils créatifs autant par leur forme que leur utilité. Jugez plutôt !

Les petits papiers de Céline Badaroux

(source : https://celinebadaroux.fr/les-petits-papiers/)

Le principe est simple : on tire au hasard un papier dans chaque pot, puis on réfléchit à un (ou plusieurs) pitch en se basant sur le tirage obtenu. Ensuite, rien n’empêche d’écrire une nouvelle, voire un roman en partant d’un de ces pitchs, bien au contraire.

Cet outil a de multiples qualités. Son aspect ludique, bien évidemment. Mais aussi le côté personnalisable et modulable, qui permet de l’adapter à ses envies et ses besoins.

Il représente également un formidable exercice pour faire travailler son imagination, pour booster son inspiration et, pour les plus téméraires d’entre nous, pour sortir de notre zone de confort en écrivant, par exemple, une romance dans l’espace ou un thriller sous marin (Werber a bien fait un thriller dans la fourmilière).

L’exercice d’écriture de la semaine

Il est simple et vous l’avez sans doute déjà compris. Je propose tout d’abord aux plus bricoleur·euses d’entre vous de confectionner leurs petits pots personnalisés (je n’ai pas encore pris le temps de le faire, alors si vous le faites, je vous en prie, envoyez-moi une photo !), de les garnir d’autant de petits papiers qu’iels le souhaitent, puis de procéder à trois ou quatre tirages et de rédiger autant de pitchs.

Vous pouvez évidemment faire varier les combinaisons en ajoutant-retirant un ou plusieurs pots à l’envie.

Pour les allergiques du DIY, Céline a pensé à tout et a conçu (un peu spécialement pour nous) une version en ligne de son formidable outil ! On l’a testée lors de l’atelier en live de mercredi dernier (que vous pouvez d’ailleurs revoir en replay, pour vous inspirer ou comprendre pourquoi je parle autant de l’espace) et autant vous dire qu’on a adoré ! 

Alors à vous de jouer, et n’hésitez pas à mettre vos tirages et pitchs en commentaire 😉